Claudine Friedberg nous a quitté cet été. Professeur au Muséum, elle a dirigé l’équipe APSONAT, « Appropriation et Socialisation de la Nature », du Laboratoire de la rue Cuvier, alors Laboratoire d’Ethnobotanique et d’Ethnozoologie, dont les héritiers sont aujourd’hui au laboratoire d’Eco-anthropologie et ethnobiologie du Musée de l’Homme. Figure de l’ethnoscience, elle porta haut les couleurs de l’anthropologie et des relations entre les sociétés et les objets naturels, à une époque où son combat n’était pas une évidence. Lors de ses terrains au Pérou, en Indonésie, à Bali et dans les Cévennes elle a noué des relations avec une communauté de chercheurs qui lui rendent hommage. L’interdisciplinarité était au cœur de sa démarche avec ses compagnons de route de NSS, Natures Sciences Sociétés.
Comment distinguer, classer, nommer et penser les relations et représentations de la nature, ici et ailleurs ? Hier, c’était un des enjeux de l’ethnoscience ou de l’anthropologie environnementale. Aujourd’hui les enjeux environnementaux sont cruciaux, et les peuples autochtones et les communautés locales sont rarement seuls sur leur territoire. La façon dont ils pensent, que nous appréhendons au travers de mots, de catégories, font l’objet d’incompréhension ou au contraire d’échanges interculturels et interlinguistiques entre divers interlocuteurs, dont les scientifiques, les gestionnaires de parcs, ou les politiques. L’anthropologie et l’ethnoscience peuvent-elles prendre part, aux côtés des communautés locales, à l’élucidation des controverses socio-éco-techniques ? Pour mieux comprendre et cogérer incertitudes et aléas, risques et changements environnementaux et climatiques auxquels font face ces communautés, encore faut-il que nous comprenions leurs mots, leurs catégories, les savoirs et les visions du monde qu’ils transmettent. C’est l’objet de cette journée.
La première conférence (key note address) sera celle du grand témoin Roy Ellen, Professeur émérite d’anthropologie et d’écologie culturelle de l’université́ de Kent, grand prix de la Société́ d’Economie Botanique. Puis anthropologues, écologues, et géographes, examineront les récents développements de l’interdisciplinarité́, renouvelant le dialogue entre anthropologie environnementale, écologie et taxinomie au Museum et au-delà̀, et porteront une nouvelle vision des sciences de la conservation incluant l’anthropologie de la conservation.
La classification, les taxinomies et valeurs données aux éléments du vivant chez les peuples autochtones, les communautés locales et dans les sciences continuent à être un élément central de nos recherches. Mais ces questions demandent aujourd’hui des approches et des engagements différents de ceux de l’ethnoscience des années 1960 à 1980. Un livre concernant ces thèmes est proposé aux éditions du MNHN : - relations entre temps et espace, transformations sociales et variations/changement climatique ; relation entre connaissance fine des savoirs locaux et gestion, incluant les classifications, de tous les processus de changement, dont le changement global ; rôle des classifications et appellations dans un contexte pluri-acteurs de modernisation et globalisation.
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